Wednesday 22 August 2012

Les vieux démons


C’était prévisible. 

Pour mobiliser sa base, le PQ est passé maître dans l’art de jouer la carte de l’insécurité linguistique.  Mais cette fois-ci, il s’est surpassé.

Interdire aux francophones (qui s'inscrivent dans une proportion de 92% dans les cégeps de langue française) et aux allophones d'étudier au collégial en anglais n’était pas suffisant. Hier, Mme Marois a annoncé qu’une fois élu, un gouvernement péquiste exigerait que l’obtention de la citoyenneté québécoise soit conditionnelle à une connaissance « appropriée » de la langue française.  Elle a ajouté : « Tous les citoyens du Québec qui veulent se faire élire dans une mairie, comme conseiller, comme député, devront avoir une connaissance du français».  

Le message que le PQ envoie est pitoyable. Il y aurait donc deux types de Québécois : les "citoyens" québécois qui parlent français et les autres. René Lévesque aurait-il appuyé cela? Vous me permettrez d’en douter.

Il vient un moment où il faut tracer la ligne entre ce qui est raisonnable et ce qui ne l’est pas.  

Le PQ ne fait-il pas confiance aux Québécois pour exercer leur jugement dans le choix de leurs représentants? Croit-il que les Québécois vont soudainement cesser d’aimer leur langue et leur culture et se ruer massivement vers les institutions anglophones? En 2012? Vraiment?

Qu’on cesse de me casser les oreilles avec les grands dangers du multiculturalisme et des vicissitudes du relativisme culturel. C’est de la bouillie pour les chats.  Dans un État démocratique libéral, les individus sont égaux. Les chartes (et oui, le Québec a aussi sa proche charte des droits) leur donnent des droits fondamentaux universels : le droit de vote, le droit d’appartenance à une religion, la liberté de conscience, le droit de circuler librement, la liberté d’association, etc. On ne charcute pas les droits des gens en fonction de leur langue ou de la couleur de leur peau.

Sur le plan linguistique, tout le monde reconnait que la loi 101 a été bénéfique. Et qu’elle est encore nécessaire. Il y a un grand consensus au Québec là-dessus. La force d’attraction de l’anglais demeure indubitable. Et tout n’est pas réglé. Il faut continuer à être vigilant. Mais il faut aussi reconnaitre qu’il y a des succès indéniables. Par exemple, entre 1996 et 2006, 75% des immigrants sont passés au français.

Le PQ souhaite que le Québec devienne un pays. C’est une option valable et légitime, qui est partagée par bon nombre de Québécois.  On peut penser que le Québec serait plus riche, plus prospère, plus écologique, plus juste et plus vertueux s’il était un pays indépendant. Si c’est le cas – et je ne suis pas de ceux qui y croient- le PQ a été particulièrement mauvais au cours des dernières années pour en faire la démonstration factuelle et rationnelle.

Ce qui est perturbant, c’est sa tendance de plus en plus évidente à définir le projet souverainiste sur des prémisses essentiellement négatives. Quand il ne fait pas de la surenchère linguistique, il caricature le Canada à outrance. 

On compte ainsi sur un rejet, sur une défaite, sur une humiliation en bonne et due forme (dans le cas qui nous occupe, il est certain que la Cour suprême invaliderait cette nouvelle loi sur la citoyenneté parce qu’elle contrevient de façon évidente à la Charte). Bref, on cherche à créer de la chicane, des conflits.  S’il est élu, il est évident que le PQ tentera par tous les moyens de se faire dire non par le reste du pays. Il ne s’en cache même pas.

En préconisant une telle approche, le PQ pratique la politique du pire. La stratégie est aussi simple que malhonnête.

Il y a un an, dans sa lettre d’adieu, Jack Layton écrivait : « L'espoir est meilleur que la peur. L'optimisme est meilleur que le désespoir.» 

Le PQ devrait peut-être s’en inspirer.



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